BOUBEKEUR BENBOUZID, MINISTRE DE L’ÉDUCATION NATIONALE, À L’EXPRESSION «Les deux raisons d’une rentrée sereine»
Entretien réalisé par A. MAMMERI et B.TAKHEROUBT
- Dimanche 12 Septembre 2010 -
|
| R. BOUDINA |
|
L’Expression: Plus de 8 millions d’élèves se rendront demain à l’école. Comment appréhendez-vous cette rentrée 2010/11? Boubekeur Benbouzid:
Je profite de l’hospitalité de vos colonnes pour souhaiter à nos
enfants une bonne année scolaire. C’est avec sérénité que nous
appréhendons cette rentrée et ce, pour deux raisons. D’abord, nous avons
la conviction que l’éducateur algérien est attaché à la noblesse de son
métier. La deuxième raison réside dans le bilan de l’année écoulée et
les réalisations pour cette année scolaire 2010/11. Ce sont là des
motifs qui poussent à l’optimisme et nous encouragent à redoubler
d’effort. Je tiens à rassurer les 8.176.700 élèves, qui rejoindront
les bancs de l’école le 13 septembre, ainsi que leurs parents. Ils
trouveront les conditions adéquates. Nous pouvons citer quelques-unes
d’entre elles. L’encadrement est en place pour les prendre en charge,
au primaire et au moyen, la qualification académique de cet encadrement
connaît une amélioration depuis 2005, avec le lancement du Plan
national de formation de type universitaire (2005/2015). Dans ces deux
cycles, le taux d’enseignants titulaires d’une licence universitaire est
passé de 13,62% de l’effectif total en 2005 à 46,14% pour l’année
2010/11. En effet, depuis le lancement de cette mise à niveau
universitaire, en 2005, le secteur a bénéficié de l’apport bonifié de
55.000 enseignants: 175.000 autres sont en cours de formation sur 3 ans
pour ceux du primaire et 4 ans pour leurs collègues du moyen. A titre de
rappel, depuis 2001, nous avons codifié par décret l’exigence de la
licence universitaire pour le recrutement au poste d’enseignant, tous
cycles confondus. Il est évident que de nos jours, le niveau académique
de l’enseignant constitue un facteur décisif dans l’amélioration de la
qualité de l’enseignement dispensé. Des infrastructures en nombre
suffisant. Pas moins de 24.765 établissements avec l’accompagnement
indispensable, le labo informatique pour tous les lycées et les
collèges, les cantines, le transport, les équipements didactiques et les
manuels, entre autres. Concernant les segments les plus fragiles de la
population scolaire, une attention particulière leur est consacrée. Les
régions enclavées du pays, celles du Sud et des Hauts-Plateaux, sont
destinataires (pour la seule année 2010/11) de 570 nouvelles cantines,
258 demi-pensions et 13 internats. Dans les zones du Sud, le nombre de
salles de classe climatisées s’améliore d’année en année. L’actuel parc
comporte 14.000 climatiseurs avec des dotations futures inscrites dans
le Plan spécial Sud. Quant aux élèves nécessiteux, les actions de
solidarité initiées dans le cadre de la réforme ont été renforcées
(gratuité du manuel, allocation spéciale de scolarité, dons des
trousseaux, y compris les tabliers). On ne peut occulter la reconduction
du dispositif de soutien scolaire aux élèves candidats aux examens
nationaux. Un soutien qui se décline en leçons de révision, travaux de
groupe et étude encadrée après la journée scolaire et pendant les jours
fériés, le week-end et une semaine à chaque vacance scolaire. Ce soutien
se déroule au sein des établissements scolaires et à titre gracieux.
Les encadreurs étant rémunérés par l’Etat.
Comment estimez-vous les résultats de la politique de refonte du système éducatif? Vous savez, nulle politique éducative ne peut emporter l’adhésion unanime. Je respecte les avis des uns et des autres. En
ce qui nous concerne, il n’y a de vraie évaluation que celles initiées à
partir d’indicateurs universels consacrés par l’Unesco. Et sur ce plan,
la réforme nous a imposé une culture de l’évaluation calquée sur les
standards internationaux Il s’agit de passer, de façon périodique, le
rendement de notre secteur au scanner des indicateurs universels. Une
précision mérite d’être soulignée: les taux de réussite aux examens, à
eux seuls, ne suffisent pas à évaluer objectivement le rendement d’un
système scolaire. Pour mieux apprécier la situation actuelle où se
trouve l’Ecole algérienne, nous devons prendre en considération deux
périodes - repères et deux types d’indicateurs: ceux à caractère
pédagogique et ceux ayant une dimension sociale. En l’an 2000, une
évaluation nationale a été achevée. Elle avait pour finalité de
diagnostiquer l’état de santé de l’école algérienne, et préparer le
terrain au lancement de la réforme laquelle exige une évaluation d’étape
tous les deux ans. Celles de l’an 2006, 2008 et 2010 - années de la
réforme - nous indiquent le chemin parcouru et les efforts qui restent à
fournir. En 2000, l’ensemble des indicateurs étaient au rouge. Cette
dégradation du rendement avait alimenté la spirale de la déperdition
scolaire. Depuis, et de façon progressive, ils s’améliorent. Beaucoup
d’indicateurs sont passés au vert, avoisinant les normes
internationales. Actuellement, l’Algérie enregistre un taux de
scolarisation (des enfants de six ans) de 98%: soit au même niveau que
des pays développés. En 2000, ce taux était de 93%. Ce taux de 98%
est conforté par un autre, celui de la scolarisation tout au long du
cycle obligatoire qui concerne les enfants âgés de 6 à 15 ans. Il s’agit
d’un indicateur important dans la mesure où il aide à cerner l’ampleur
de la déperdition scolaire en cours de route. Comparativement à la
période antérieure à la réforme, l’école rejette de moins en moins
d’élèves. Considérée à juste titre comme un grave dysfonctionnement, la
déperdition scolaire est, de nos jours, confinée dans des proportions
gérables. Ce constat est corroboré par les indicateurs d’efficacité
mesurant les performances pédagogiques de notre système. Il est bon de
rappeler qu’en 2000, sur 100 élèves qui entraient en année primaire, 26
ne terminaient pas leur scolarité obligatoire (soit un taux de 74%). En
2010, ce taux de fréquentation de l’école (jusqu’à 15 ans) a atteint les
95,68%, seuls quatre (4) élèves n’ont pas terminé leur scolarité
obligatoire. Les passages au cycle supérieur couplés aux examens de
fin de cycle nous renseignent aussi sur le recul de cette déperdition
tant décriée à juste titre. En 2000, sur 100 élèves du primaire, 23
d’entre eux n’accédaient pas au collège (taux de 77,23% d’admis). En
2010, ce sont environ 93 élèves qui accèdent au cycle moyen (taux
d’admis en 1re AM: 92,68%). Sur la déperdition, la réforme a enregistré,
pour le seul cycle primaire, un gain de 14 points en dix ans. Le
passage au lycée connaît une évolution légèrement supérieure, soit un
gain de 23 points: le taux d’admis en 1re AS était de 53,54% en 2000.
Dix ans plus tard, il grimpe à 76,04%. Les élèves recalés en fin de
cycle moyen peuvent redoubler quand ils n’ont pas atteint l’âge de seize
ans, ou s’orienter vers la formation professionnelle. Ici, j’apporte
une précision. La réforme a institué un dispositif d’orientation
novateur au bénéfice des collégiens et lycéens. Il s’appuie sur une
étroite collaboration entre notre secteur et le ministère de
l’Enseignement et de la Formation professionnels. Cette mutualisation
des efforts nous permettra à moyen terme de gommer définitivement le
spectre de la déperdition. Quand on aborde la question de l’école,
nous pensons qualité de l’enseignement et taux de réussite. Dans ce
domaine, des progrès ont été enregistrés grâce notamment à la rénovation
du dispositif pédagogique (programmes, manuels, évaluation) et aux
critères de recrutement et de formation des enseignants. Ainsi, le
taux de redoublement qui était de 17,49% pour les trois cycles
confondus, en 2003/2004 (année de lancement de la réforme) a baissé de 4
points pour passer à 13,57%, en 2009/2010. Quant aux élèves qui
abandonnent l’école, leur nombre a fortement diminué ces dernières
années. En effet, au cycle primaire le taux d’abandon a chuté de 2% en
2003/2004 à 1,62% en 2009/2010. Pour la même période, le collège a connu
une diminution sensible de ce taux. Il est passé de 9,36 à 9,02%.
L’amélioration constante de ces indicateurs d’efficacité, la
modernisation induite par les équipements didactiques et les nouvelles
infrastructures ainsi que les différentes actions de soutien aux élèves
ne pouvaient que déboucher sur des progrès en termes de taux de réussite
aux examens nationaux. D’année en année, plus particulièrement depuis
le lancement de la réforme, se dessine une courbe ascendante des taux de
réussite. Par le passé, les taux de réussite au BEM et au BAC
oscillaient entre 10 et 30% dans le meilleur des cas avec, toutefois,
des rachats à 9, voire 8/20. Avec la réforme, les exigences pédagogiques
sont respectées: seule la moyenne compte pour accéder au palier
supérieur. Cette rigueur pédagogique a suscité un surcroît d’efforts et
de mobilisation chez les élèves et chez les enseignants. De la sorte,
les taux de réussite au brevet et au baccalauréat enregistrés ces
dernières années donnent à voir les écarts. En 2000, le BEM avoisinait
le taux de réussite de 41,53%, ce taux est de 66,35 en 2010. Même
constat pour le baccalauréat. 32,29% en 2000 pour doubler en 2010, soit
un taux de 61,23%. Détail et non des moindres qui renforce cette
dynamique de réussite et renseigne sur la qualité de l’enseignement
dispensé: pour la première fois depuis l’Indépendance, l’Algérie vient
de former des bacheliers avec mention «excellent». Pour la session 2010,
ils sont au nombre de 49 candidats scolarisés à avoir décroché une
moyenne supérieure à 18 sur 20. Les autres mentions dont les moyennes
varient entre 12 et 18/20 ont connu un bond significatif. Ils n’étaient
que 14 484 candidats lauréats en juin 2000. Pour la session de juin 2010
ce nombre a progressé pour atteindre 98 044 lauréats ou 44% du nombre
total de bacheliers. Le rendement et la qualité de notre pédagogie
sont au coeur de nos préoccupations. Des évaluations périodiques nous
renseignent sur les manques à combler et les points forts à consolider.
Tout n’est pas au beau fixe, beaucoup reste à faire et c’est là tout le
défi que nous lance cette réforme. Dans cet ordre d’idées, notre secteur
s’est enrichi par la création d’une inspection générale de la
pédagogie. Elle aura en charge le suivi, (l’évaluation et l’animation)
de la vie pédagogique au sein de nos établissements scolaires. D’autres
indicateurs servent à mesurer l’efficacité pédagogique qui nourrit la
motivation au travail: ce sont les ratios d’encadrement. L’effectif
élèves par classe est passé de 40 en 1999 à 30 pour la rentrée 2010/11.
Le nombre d’élèves par enseignant a, lui aussi, diminué. En 2000, un
enseignant du primaire avait à sa charge un effectif de 28 élèves. En
2010, il n’en a que 23. Idem pour son collègue du secondaire. Il
encadrait 18 élèves en 2000, alors que pour l’année scolaire 2010/11, ce
taux est ramené à 16 élèves par enseignant. Toutefois, il s’agit là de
moyennes nationales qui n’excluent pas des disparités inter et
intrawilayates. Ces disparités nous interpellent au plus haut point et
nous veillons à ce qu’elles se réduisent à leur plus simple expression. La
couverture en laboratoires informatiques est de 100% dans les cycles
moyen et secondaire, le primaire étant programmé en concertation avec le
ministère de la Poste et des Technologies de l’information et de la
communication. En septembre 2003, à la veille du lancement de la
réforme, le déficit en enseignants de niveau universitaire était estimé à
214.000 enseignants du primaire et du moyen. Ce déficit est en voie
de résorption grâce au plan national 2005 - 2014 mis en place
conjointement avec le ministère de l’Enseignement supérieur. Pour la
rentrée de septembre 2015, nous aurons atteint le taux de 95%
d’enseignants (du primaire et moyen) de niveau universitaire. C’est
un investissement lourd pour l’Etat mais rentable à moyen et long terme.
Avec une formation académique élevée, l’enseignant peut et doit
enseigner mieux. Cette ambitieuse volonté de relever le niveau
académique des enseignants a participé à l’amélioration des taux de
réussite aux examens nationaux. Sous d’autres cieux, une formation
universitaire de ce type est du ressort exclusif de la personne. Sur
un autre plan, la démocratisation de l’école, la concrétisation des deux
principes universels de l’égalité des chances et de l’égalité des
moyens constituent trois axes majeurs sur lesquels nous avons obtenu de
belles réalisations. Ainsi de 6% de bénéficiaires des cantines en 1999,
le taux national a grimpé à 75% en 2010 avec une pointe à 100% dans le
Sud. Depuis 2005, est institué le soutien scolaire gratuit au bénéfice
de tous les élèves candidats aux examens nationaux ainsi que la
remédiation pédagogique pour les élèves en difficulté scolaire. Cette
année, la gratuité du manuel scolaire s’est élargie au bénéfice de 4
millions d’élèves. Quant aux traditionnelles actions de solidarité
(trousseau, prime de 3000 dinars, restauration et transport), elles
continuent d’alléger les sacrifices des enfants nécessiteux. Ce vaste
mouvement d’actions à caractère social ont nécessité des efforts
soutenus de la part de l’Etat algérien: 6,5 milliards de dinars pour la
seule gratuité du livre scolaire.
Le manuel scolaire est au
coeur des polémiques. Est-il possible que d’anciens livres scolaires
comportant des erreurs soient encore en circulation? Sur ce
sujet, aucune polémique n’est survenue ces deux dernières années.
Pendant la décennie 1990, il y avait des difficultés à diffuser et à
produire en temps réel, le nombre suffisant de manuels. Nous avons connu
une époque où un manuel servait à deux, voire trois élèves en même
temps. Ce qui n’est plus le cas maintenant. La modernisation de notre
imprimerie centrale nous permet de produire des stocks de sécurité
jusqu’à 10% de plus que les besoins réels. Pour la rentrée de septembre,
l’Onps a produit 60 millions de manuels. Et chaque élève algérien
disposera d’un manuel par discipline. Quant aux contenus des manuels,
les anciens ont été remplacés dès l’avènement des programmes de la
réforme, et ce depuis 2003. Des experts nationaux et étrangers les ont
évalués avec les correctifs apportés en temps voulu. Quant aux erreurs
passées, elles ne sont plus de mise grâce à la vigilance d’une
commission de suivi spécialement affectée à la relecture des manuels.
Elle a été installée en 2007. Il est faux d’affirmer que des anciens
livres sont en circulation. Les élèves sont tous destinataires de livres
neufs, de meilleure qualité technique avec des contenus modernisés,
comparativement aux manuels d’avant la réforme.
A la veille de
chaque rentrée, le spectre des grèves revient. Peut-on rassurer les
élèves et leurs parents quant au bon déroulement de l’année scolaire? Il
est de mon devoir de les rassurer. Toutes les conditions sont mises en
place pour une année scolaire sereine et studieuse. Nous l’avons placée
sous le signe de l’amélioration de la gestion multiforme tant au niveau
des établissements que des Directions de l’Éducation. C’est à ce prix
que nous ferons la promotion de ces deux valeurs cardinales que sont le
travail et la concertation. Nos évaluations nationales nous ont donné
une image très instructive. L’établissement où règne la bonne gestion
connaît moins de perturbations et décroche de bons résultats aux
examens. Il faut comprendre par gestion l’ensemble des attitudes et des
comportements quotidiens que doivent observer avec conscience et
professionnalisme le chef d’établissement et ses collaborateurs.
Vous
avez annoncé que les enseignants qui cumulent trois absences non
justifiées sont passibles de licenciement. Cette décision est perçue par
les enseignants comme une provocation car jugée non conforme aux
statuts régissant la Fonction publique. En tant que ministre, je
suis le premier responsable à devoir respecter scrupuleusement les
textes en vigueur. Que disent ces derniers au sujet de l’absentéisme du
fonctionnaire, pas seulement l’enseignant? Ils le combattent avec la
force de la Loi. Et là, il faut préciser que l’absentéisme est un mal
pernicieux qui peut devenir un fléau. Des enquêtes de terrain nous
signalent des situations dangereuses. C’est le cas de ces deux lycées
d’une ville des Hauts-Pateaux où, lors de l’année scolaire 2009/10, les
élèves, les enseignants et l’administration n’ont rejoint leurs
établissements respectifs qu’une fois passés le Ramadhan et les fêtes de
l’Aïd: soit une rentrée scolaire différée de plus d’un mois. Il est
temps de rappeler les mesures préventives telles que codifiées par les
textes réglementaires. Une procédure de lutte contre ce fléau existe.
Elle est pratiquement la même dans tous les pays. Nous devons
l’appliquer pour sauvegarder l’intérêt de nos enfants. Sans pour autant
tomber dans l’amalgame: ne confondons pas l’absence légale et celle
injustifiée ou de complaisance. Nos enseignants ont le sens du devoir et
une bonne connaissance de leurs droits. Il ne viendra à l’esprit de
personne d’accepter que s’installe le fléau de l’absentéisme dans nos
établissements scolaires. II y va de l’intérêt de nos enfants. En
réalité, l’éthique et la déontologie de notre métier d’éducateur nous
imposent une lutte concertée contre l’absentéisme. Cette lutte
implacable doit être menée conjointement par l’administration, les
enseignants et les parents.
Le régime indemnitaire, les
oeuvres sociales, la médecine du travail, la retraite sont autant de
questions qui préoccupent la corporation. Si votre département est en
train de régler le premier problème, certains enseignants estiment que
ce n’est pas le cas pour les autres. De tous les secteurs de la
Fonction publique, celui de l’éducation nationale est le premier, le
seul à ce jour, à avoir réglé la question du régime indemnitaire, du
statut particulier et des rappels. Cela est le fruit d’un dialogue
soutenu et permanent entre l’administration centrale et les partenaires
sociaux. Quant aux autres dossiers que vous avez évoqués, ils sont du
ressort exclusif d’autres départements ministériels, voire du
gouvernement. Ils ne relèvent pas de nos prérogatives. Cela ne veut pas
dire que nous sommes indifférents à ces problèmes. La médecine du
travail est partie prenante du système national de santé publique. Des
procédures de prise en charge existent. Elles méritent d’être
consolidées pour assurer le droit de la personne à la santé. Il est
évident qu’il est impossible d’offrir à chaque secteur un mode
particulier de prise en charge médicale. Quant au dossier des oeuvres
sociales, il fait l’objet d’une attention particulière de la part des
plus hautes autorités du pays. Ce dossier est important et il figure
dans l’agenda du gouvernement pour y être étudié.
Pour la
troisième année consécutive, la wilaya de Tizi Ouzou a obtenu le
meilleur taux de réussite au Bac. Qu’ a fait votre département pour
inciter d’autres wilayas à en faire autant? Quand une équipe se
mobilise, et travaille en collectif avec le souci de bien faire, elle ne
peut que réussir. Dans un certain nombre de wilayas, les parents, les
enseignants et les administratifs se sont hissés au diapason des enjeux
de la scolarité de leurs enfants. Elles ont vu leurs taux de réussite
s’améliorer et dépasser la moyenne nationale. Ces wilayas servent
d’exemple en matière de management pédagogique et de bonne gouvernance.
Nous citerons quelques-unes qui affichent une carte de visite
satisfaisante: EI Bayadh, Mascara, Relizane, Tizi Ouzou, Alger, Tipaza.
D’ailleurs, beaucoup de wilayas ont décroché des taux de réussite
supérieurs à la moyenne nationale. Mais cela reste insuffisant. Nous
sommes en train d’affiner un dispositif de terrain qui sera opérationnel
dès cette rentrée. Il se décline en un contrat -programme pour le
directeur de l’Education et un projet éducatif pour l’établissement
scolaire. Il appartient à tous les responsables de veiller à améliorer
leurs performances dans la gestion tant pédagogique que matérielle et
humaine. L’obligation de résultats constitue un axe important dans la
promotion de notre système scolaire. Et elle commence à la base:
l’établissement scolaire. La tutelle a pour mission d’accompagner, de
soutenir les équipes pédagogiques et administratives. C’est à ces
dernières qu’il revient d’améliorer leurs résultats avec les efforts des
élèves et la participation des parents. Il est inadmissible que dans la
même localité pour le même examen deux établissements voisins avec des
moyens identiques enregistrent des écarts du genre 10% pour l’un et 80%
pour l’autre au BAC, au BEM ou en 5°AP.
Depuis 15 ans
l’enseignement de tamazight peine et ses enseignants se plaignent d’être
lésés et mal considérés. Quelle est la place de cette langue dans le
système scolaire? En tant que discipline scolaire, la langue
tamazigh jouit du même statut que les autres langues enseignées. Elle
est dotée d’un GSD (groupe spécial de la discipline) au sein de la CNP
(commission nationale des programmes) qui élabore un programme officiel.
Son enseignement répond aux critères classiques: un programme par
niveau, un enseignant formé, des manuels, un coefficient et des
modalités d’évaluation. Sa présence est attestée dans les bulletins
scolaires et aux examens nationaux. Depuis deux ans, tamazight figure
aux épreuves du BEM et du BAC. Elle est enseignée à un effectif
global de 194.418 élèves dont 179.967 au primaire et au collège et
14.451 au lycée. Parmi l’encadrement, nous avons des licenciés
universitaires et des contractuels. Toutefois, cet enseignement n’est
pas homogène vu qu’il dépend de l’état de développement de l’outil
linguistique. Sur ce dernier point, le ministère de l’Education
nationale n’a ni les compétences ni les prérogatives pour solutionner
des questions éminemment scientifiques. Elles sont du ressort des
universitaires versés dans le domaine. Concernant les enseignants de
tamazigh, ils sont recrutés et formés dans les mêmes conditions
statutaires que leurs collègues des autres disciplines. Ceux qui ne
répondent pas aux critères de la Fonction publique sont invités à
rejoindre notre dispositif de mise à niveau, par le biais de la
formation. Ils sont autorisés à accéder au rang statutaire, à condition
qu’ils fassent l’effort de se former en conséquence. Le ministère est
totalement disposé à les aider dans cette promotion.
Les
écoles privées sont une réalité incontournable dans le système scolaire
national. Cependant chaque année, des anomalies apparaissent. Comment
expliquez-vous cette situation? Vous avez raison de rappeler
cette réalité. Effectivement, les écoles privées sont officiellement
intégrées dans le paysage scolaire national avec un effectif global de
25.000 élèves. Elles sont jeunes et ont besoin de notre soutien pour
acquérir plus d’expérience. Cependant, vous n’avez pas précisé le genre
«d’anomalies» qui, selon vous, apparaissent chaque année. Les portes du
ministère sont en permanence ouvertes pour recueillir leurs doléances.
Nous encourageons les initiatives privées à investir dans le secteur de
l’éducation dans le strict respect de la réglementation. Il est vrai que
nous sommes tenus de penser en priorité aux écoles publiques vu le
nombre d’inscrits. Toutefois, la réglementation nous oblige à nous
intéresser aux prestations pédagogiques de ces écoles qui, ne l’oublions
pas, accueillent des enfants algériens.
La drogue et la violence à l’école prennent de l’ampleur. Comment comptez-vous lutter contre ces fléaux? Que
peut faire l’institution scolaire pour contrer ces deux fléaux sociaux
si ce n’est agir par la prévention, la sensibilisation et éventuellement
la collaboration avec d’autres autorités compétentes. Ce sont ces
dernières qui ont pour vocation et mission de les combattre. Quant à
leur présence au sein des établissements scolaires, elle n’est pas aussi
répandue au point de tirer la sonnette d’alarme comme le suggère votre
question. A ce que je sache nous n’avons pas connu d’actes de violence
aussi barbares que ceux vécus dans certains pays occidentaux. L’arsenal
réglementaire prévoit des mesures dissuasives. Je vous renvoie à la loi
n°08/04 du 23 janvier 2008. Ce texte consacre une batterie d’articles à
la communauté éducative, seule garante d’une éducation préventive qui
éloignera à tout jamais ces dangers du voisinage de nos enfants. Les
éducateurs qui ont la charge de nos élèves sont les premiers remparts
contre de telles déviances. En définitive, c’est par la mobilisation
générale de la société, mouvement associatif, parents, spécialistes et
l’engagement des pouvoirs publics que ces fléaux pourront reculer. C’est
dans cet esprit de collaboration qu’a été installée une commission
nationale dont les travaux sont appelés à connaître un renforcement dès
l’entame de cette année scolaire 2010/11.
Droits de reproduction et de diffusion réservés (c) L'Expression |